A relire et méditer, un passage, pris au hasard:(à retrouver dans son intégralité sur
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« En réalité, on savait peu de chose des prolétaires. Il n’était pas nécessaire d’en savoir beaucoup. Aussi longtemps qu’ils continueraient à travailler et à engendrer, leurs autres activités seraient sans importance. Laissés à eux-mêmes, comme le bétail lâché dans les plaines de l’Argentine, ils étaient revenus à un style de vie qui leur paraissait naturel, selon une sorte de canon ancestral. Ils naissaient, ils poussaient dans la rue, ils allaient au travail à partir de douze ans. Ils traversaient une brève période de beauté florissante et de désir, ils se mariaient à vingt ans, étaient en pleine maturité à trente et mouraient, pour la plupart, à soixante ans. Le travail physique épuisant, le souci de la maison et des enfants, les querelles mesquines entre voisins, les films, le football, la bière et, surtout, le jeu, formaient tout leur horizon et comblaient leurs esprits. Les garder sous contrôle n’était pas difficile. Quelques agents de la Police de la Pensée circulaient constamment parmi eux, répandaient de fausses rumeurs, notaient et éliminaient les quelques individus qui étaient susceptibles de devenir dangereux.
On n’essayait pourtant pas de les endoctriner avec l’idéologie du Parti. Il n’était pas désirable que les prolétaires puissent avoir des sentiments politiques profonds. Tout ce qu’on leur demandait, c’était un patriotisme primitif auquel on pouvait faire appel chaque fois qu’il était nécessaire de leur faire accepter plus d’heures de travail ou des rations plus réduites. Ainsi, même quand ils se fâchaient, comme ils le faisaient parfois, leur mécontentement ne menait nulle part car il n’était pas soutenu par des idées générales. Ils ne pouvaient le concentrer que sur des griefs personnels et sans importance. Les maux plus grands échappaient invariablement à leur attention…
Il y avait tout un État dans l’État, fait de voleurs, de bandits, de prostituées, de marchands de drogue, de hors-la-loi de toutes sortes. Mais comme cela se passait entre prolétaires, cela n’avait aucune importance. Pour toutes les questions de morale, on leur permettait de suivre leur code ancestral. Le puritanisme sexuel du Parti ne leur était pas imposé. L’inversion sexuelle n’était pas punie, le divorce était autorisé. Entre parenthèses, la dévotion religieuse elle-même aurait été autorisée si les prolétaires avaient manifesté par le moindre signe qu’ils la désiraient ou en avaient besoin. Ils étaient au-dessous de toute suspicion. Comme l’exprimait le slogan du Parti : « Les prolétaires et les animaux sont libres. »
Effrayant…
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Ce qui est bien avec la lecture, c’est qu’on s’évade.
Ouaip. On oublie tous nos soucis.
Kiki 🙂
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hélas!
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Oui, à relire et méditer. Certains, voient plus loin que d’autres.
Ce roman a toujours été mal perçu par l’idéologie marxiste parce que démontant l’idéologie qui est pure intégrisme, comme nous dirions aujourd’hui.
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Elle le peut être mal percu , puisque comme toutes pensées radicales, le marxisme a été digéré et déformé par le systeme pour en faire son contraire; le bolchevisme (et ce qui a suivi) est en a fait un capitalisme d’etat . Marx n’a pas cessé de dire qu’il n’etait pas marxiste. MAis ce sont les vainqueurs qui font l’histoire et comme dit Marx, celui qui ne connait pas son histoire est condamné a la revivre
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Tristement d’actualité lorsque que l’on constate la collusion entre pouvoir et medias( TF1 en particulier) qui ont depuis longtemps fomenter cette accession au pouvoir de NS, le mépris affiché à travers toutes ces simagrés électorales et médiatiques. Voir à ce sujte la chronique de D.Schneiderman dans Libé aujourd’hui.
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je pense que je vais aussi aimer votre site : des énigmes avec Steinbeck, un extrait d’Orwell…
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