Librairie Kléber , Strasbourg. 19 mars 2008. 17h30
Moment de grâce. Alaa el Aswany, géant égyptien à la voix chaude de baryton, parle de ses livres. Vous savez, « L’Immeuble Yacoubian« , devenu un best-seller et dont on a tiré un film . Et puis « Chicago » , paru depuis presqu’un an chez Acte Sud.
Alaa el Aswany , né en 1957, suit une scolarité au lycée français du Caire, poursuit des études de dentiste au Etats-Unis, justement dans ce Chicago qui impose son titre à son deuxième grand succès littéraire. Quant à « L‘Immeuble Yacoubian », c’est celui où le dentiste a établi son cabinet au retour de Chicago. Réalisme des lieux. Fresque de personnages hauts en couleur. Diversité des choix de vie. Observation du quotidien pour mieux cerner le basculement des mentalités. En Egypte, à la fin des années 50. Aux Etats-Unis, après le 11 septembre.
Alaa el Aswany ne boude pas son plaisir. Il est fier de se voir en tête des ventes dans tout le monde arabe et en position enviable dans nombre de pays. Il le dit, très naturellement. Il dit aussi son désir d’écrire une littérature en strates. Des livres qu’il est aisé de lire. Des livres pour tous. Mais aussi des livres où l’on peut déceler autre chose lors d’une deuxième lecture. Voire d’autres nombreuses lectures. Comme cela lui arrive lorsqu’il relit « Le vieil homme et la mer » que sa petite fille de 10 ans aime, parce qu’elle suit l’histoire du poisson et que lui, découvre autrement à chaque relecture…
Il affirme encore sa conception de la littérature: « une littérature qui n’embrouille pas le lecteur à dessein. Rien n’est plus facile, explique-t-il, que d’écrire un livre auquel personne ne comprend rien! J’ai pourtant des amis qui pratiquent cette école-là. Qui empruntent des chemins ésotériques. Ce n’est pas mon cas. »
« De plus, il ne faut jamais confondre ce que les personnages disent dans un roman et la vraie voix de l’auteur. C’est dangereux, insiste-t-il. On le fait trop souvent. » Et bien sûr il a été menacé ici ou là pour cette raison. Car la littérature ne peut pas grand chose pour changer le monde ou ébranler les régimes totalitaires. Vraiment, non. Il n’y croit pas. Quand il veut prendre ouvertement position, il rédige un article ou milite dans un mouvement politique. Mais la littérature, c’est autre chose. Par la rencontre des vies multiples qu’elle propose, elle nous change. Individuellement. Elle nous permet parfois de comprendre l’autre. Elle nous rend ainsi plus ouverts, plus généreux.
Ce que peut la littérature, selon Alaa el Aswany? C’est peu et c’est pourtant beaucoup: « nous rendre tout simplement plus humains! » Vaste et magnifique programme qui ne craint ni le cynisme des censeurs, ni de s’afficher comme tel, en toute élégance et simplicité.
Cet écrivain dans un Strasbourg de gauche : fiction réalisée.
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Je l’avais entendu chez Alain Veinstein, mais ce devait être l’année dernière car je ne le vois pas dans les archives de l’émission.
http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/jour_lendemain/archives.php
(à ce propos, je vais bientôt m’écouter celle d’Annie Ernaux dont j’entends du bien partout sans l’avoir lue)
Je me souviens d’un homme d’une grande sincérité et d’une grande élégance. Un Monsieur, quoi !
Kiki 🙂
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Oui, c’est cela, un grand Monsieur.
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